Les Formule 1 modernes

Nous sommes en 1986 et déjà, il est question d'un châssis moderne. Par "moderne", il faut comprendre que l'architecture du châssis a posé dès cette époque les fondements de la Formule 1 moderne radio-commandée. Il y a 30 ans, donc...

En 1986, le marché de la RC est en pleine euphorie du buggy. Le Road Wizard apparaît donc comme un coup d'essai, un test pour déterminer si le public trouve encore de l'intérêt dans ce type de châssis. Ce qui renforce cette impression, c'est qu'il est essentiellement basé sur les châssis de deux autres modèles piste (les modèles 58042 et 58052, voir plus bas) dont il reprend l'essentiel des trains avant et arrière. De plus, le Road Wizard n'est pas la réplique d'une Formule 1 grandeur nature ce qui limite les coûts liés à l'obtention d'une licence de reproduction. Tout laisse donc penser que ce modèle a servi de test pour Tamiya.

 

Les différentes décorations possibles

Tamiya 5853 Road Wizard F1 decoration set

 

Le Road Wizard est le premier modèle Tamiya livré avec 2 carrosseries (en lexan) et 3 planches complètes permettant autant de décorations possibles. Par rapport aux générations précédentes, le châssis est encore plus léger car il fait appel à de la fibre de verre (Fiberglass-Reinforced Plastic) et dispose d'une vraie suspension par amortisseur hydraulique au lieu de compter sur la déformation du châssis pour endosser ce rôle. Le Road Wizard n'est pas un modèle particulièrement fiable ni résistant, mais il est très important dans la gamme Tamiya car il est le véritable grand-père de tous les châssis Formule 1 modernes.

Il sera suivi en 1987 par deux autres modèles qui reprennent la même base en apportant quelques améliorations permettant d'accroître la fiabilité et le comportement du châssis.

 

58068 Lotus Honda 99T (1987)

Tamiya 58068 Lotus Honda 99T

 

Le test réalisé par Tamiya s'avère concluant alors que le marché est encore en pleine explosion du marché des buggys tout terrain. Le Road Wizard puis ses deux évolutions permettent à Tamiya de décider de la poursuite du programme de développement de cette plateforme qui se concrétisera 3 ans plus tard avec la sortie du châssis F101 inauguré par le modèle 58084 Ferrari F189. Dès lors, bien qu'il s'agisse d'un segment de marché assez spécifique en RC, la plateforme Formula connaîtra le succès tout au long des années 90 et jusqu'à nos jours.

Esprit visionnaire ou simple circonstance ? Je voterais pour la première hypothèse car 1990 marque un tournant décisif et radical du marché : après une décennie d'engouement pour les buggys tout-terrain, le public se tourne massivement vers les modèles piste sous l'impulsion ... de Tamiya. Nous y reviendrons en détail quand nous aborderons l'histoire des plateformes DF-01 / TA-01.

1990 marque donc les débuts du châssis F101, ainsi nommé rétrospectivement puisque Tamiya n'avait pas encore pris l'habitude de donner un nom à ses châssis.

 

Le châssis F101

Tamiya F101 chassis

Vue générale du modèle

Tamiya 58084 overview

58090 Tyrrell 019 Ford (1990)

Tamiya 58090 Tyrrell 019 Ford

58095 Lotus 102B Judd (1991)

Tamiya 58095 Lotus 102B Judd

58103 Jordan 191 (1992)

Tamiya 58103 Jordan 191

 

La parenté du F101 avec le châssis du Road Wizard est assez flagrante. Toutefois, le F101 apporte un certain nombre d'évolutions importantes au nombre desquelles un différentiel à billes, une suspension plus efficace offrant une plus grande amplitude, et enfin une solidité générale du châssis en nette augmentation. Il est assez surprenant de voir que le dernier modèle basé sur le châssis F101 précède de quelques mois à peine l'apparition du châssis F102 : difficile d'expliquer ce 103ème modèle. Tamiya a peut être connu des difficultés dans l'obtention de l'accord de licence pour la carrosserie de ce modèle, ce qui pourrait expliquer une sortie tardive : en effet, la Jordan 191 grandeur nature a participé au championnat du monde de Formule 1 durant la saison 1991, or sa réplique radio-commandée n'a été commercialisée que fin 1992.

Le châssis F101 aura eu une durée de vie relativement courte (si l'on passe outre la sortie tardive du modèle 58103 Jordan 191) et laisse place dès 1992 au F102 qu'inaugure le modèle 58104 McLaren MP4/6 Honda.

 

58104 McLaren MP4/6 Honda (1992)

Tamiya 58104 McLaren MP4/6 Honda

Le châssis F102

Tamiya F102 chassis

Les trains du châssis F102

Tamiya F102 chassis drivetrains

58105 Williams FW14 Renault (1992)

Tamiya 58105 Williams FW14 Renault

58118 Benetton B192 (1993)

Tamiya 58118 Benetton B192

 

Le châssis F102 a également connu une durée de vie courte. Malgré cela, il s'agit d'un châssis qui offre de bonnes performances, notamment au niveau de la motricité. Le F102 est plus étroit que son prédécesseur et introduit quelques améliorations au nombre desquelles la plus visible concerne les jantes : pleines sur le F101, elles sont à rayons sur le F102 et gagnent en rigidité. Enfin, c'est surtout au niveau du comportement que se fait la plus grande différence car la nouvelle version apporte une meilleure adhérence du train avant.

L'année 1993 voit apparaître le châssis F103, celui qui compte le plus grand nombre de modèles au sein de la plateforme Formula, et le premier qui offre différentes déclinaisons. C'est incontestablement le châssis le plus réussi de Tamiya depuis les débuts de la plateforme Formula. Une réédition en série limitée aura d'ailleurs lieu en 2008 pour fêter ses 15 ans, signe de son importance pour le fabricant.

 

58126 Lotus 107B (1993)

Tamiya 58126 Lotus 107B

Le châssis F103

Tamiya F103 chassis

 

Cette nouvelle génération apporte des améliorations considérables par rapport au F102, notamment un système d'amortisseur à disques de friction qui réduit le roulis et une direction améliorée grâce au montage vertical du servo. Les performances et le comportement du châssis F103 atteignent un niveau sans commune mesure avec ses prédécesseurs dès lors que le pilote est capable de le pousser dans ses retranchements. Il existe plusieurs déclinaisons de ce châssis :

 

Le châssis F103L (1994)

Tamiya F103L Chassis

Le châssis F103RS (1995)

Tamiya F103RS Chassis

Le châssis F103LM (1999)

Tamiya F103LM Chassis

Le châssis F103GT-DD (2006)

Tamiya F103GT-DD Chassis

58134 Lola T93/00 Ford

Tamiya 58134 Lola T93/00 Ford

58247 Audi R8R

Tamiya 58247 Audi R8R

58376 Advance Courage LC70 Mugen

Tamiya 58376 Advance Courage LC70 Mugen

 

Le F103L est une variante dont l'empattement a été rallongé de 20mm pour s'adapter aux carrosseries des voitures Indy, probablement pour cibler le marché nord-américain. Le F103RS reprend la base du F103 en apportant essentiellement un gain de poids et une amélioration du système de suspension à disques de friction afin de permettre d'en affiner les réglages : c'est la variante la plus aboutie et la plus performante. Quant au F103LM, il s'agit d'une adaptation unique pour la reproduction de l'Audi R8R (LM pour LeMans).

Le F103GT-DD est un cas un peu particulier car il s'agit d'un châssis conçu comme une alternative aux châssis DTM. Moins cher, mécaniquement plus simple (donc plus facile à entretenir), le F103GT-DD est également beaucoup plus léger qu'un châssis DTM classique. Les excellentes performances de ce châssis lui permettent de combler le handicap de ses deux roues motrices face aux 4 roues motrices en catégorie DTM. Cette version comporte quelques améliorations, notamment un train avant qui bénéficie de triangles à suspension indépendante et une hauteur ajustable pour la boite de transmission, le tout rendant le châssis compatible avec la majorité des carrosseries de type Touring.
Hormis en club et lorsque le règlement l'autorisait, le châssis F103GT-DD n'a guère été utilisé. Mais lorsqu'il l'était, les bons pilotes pouvaient rivaliser avec les meilleurs châssis DTM.

A noter concernant le F103 en général : il semblerait que la production de toutes les variantes de ce châssis ait été stoppée entre 2000 et 2006, supposément à cause de problèmes de licence touchant au design du châssis. Je n'ai pu trouver aucune preuve l'attestant, mais on remarque l'absence de tout modèle utilisant ce châssis dans les éditions des  postérieures à 2001.

En 2002, Tamiya sort une nouvelle version de la plateforme Formula, un châssis très mal compris et mal reçu par les fans pour de mauvaises raisons. Et je dois bien avouer n'avoir compris moi-même ce nouveau châssis qu'après qu'un exemplaire ait rejoint ma collection. Une grande majorité de fans dont je faisais partie ont considéré le châssis F201 comme le successeur du F103. Mais avec ses 4 roues motrices, il a immédiatement été perçu comme une pure hérésie et une faute de la part de Tamiya :

 

Le châssis F201

Tamiya F201 Chassis

 

Formule 1 + 4 roues motrices => n'importe quoi ! En résumé, c'est la perception du F201 chez une grande majorité de fans.

En fait, Tamiya n'a jamais conçu le F201 pour succéder au F103, ni même pour être aligné en compétition officielle puisque les règlements de la catégorie F1, en RC comme en vrai, autorisent uniquement les véhicules 2 roues motrices. En revanche, le "trou noir" dans la commercialisation du F103 entre 2000 et 2006 a certainement contribué à ce que les fans se méprennent sur la vocation réelle du F201.

En réalité, comme le résume M. David Jun, "la suspension indépendante aux 4 roues et à double triangulation ressemble et fonctionne exactement comme les vraies, jusqu'aux biellettes de suspension et au système de basculeurs (...) Alors que les puristes pourraient s'élever contre un châssis Formule 1 à 4 roues motrices, d'autres pourraient rétorquer qu'un tel châssis serait davantage dans le domaine du possible qu'une voiture 2 roues motrices dotée d'un axe rigide, d'un T de suspension et de ressorts hélicoïdaux. Globalement, le châssis F201 est le châssis Formule 1 le plus réaliste que Tamiya a jamais produit."

 

58294 F201 Chassis Kit (2002)

Tamiya 58294 F201 Chassis Kit

58303 WilliamsF1 BMW FW24 (2003)

Tamiya 58303 WilliamsF1 BMW FW24

 

Le F201 est un ovni, un châssis que j'ai placé au sein de l'histoire de la plateforme Formula, bien qu'il n'appartienne pas réellement à cette lignée. Je pense que les ingénieurs de Tamiya ont conçu le F201 "parce qu'ils pouvaient le faire", en le rendant aussi réaliste que possible comme on peut s'y attendre de la part d'un fabricant aussi méticuleux de l'exactitude de ses modèles. D'une certaine manière, je considère que le F201 est dans la lignée "spirituelle" d'autres modèles de Tamiya, comme la Tyrrell P34 Six Wheeler et le B2B Racing Sidecar que nous avons vus précédemment, ou encore la célèbre Porsche 959 de 1986 que nous verrons un peu plus tard.

Voici le châssis F201 en action avec ma Ferrari F2001 sur le piste du club :

 

Malgré la sortie du châssis F103GT-DD 3 ans plus tôt, Tamiya ne dispose plus de châssis Formule 1 "de course" depuis près de 10 ans. C'est alors que Tamiya présente le tout nouveau châssis F104 Pro au salon du modélisme de Shizuoka en mai 2009. Cette fois, il s'agit bien du successeur du F103.

 

58431 F104 Pro Chassis Kit (2009)

Tamiya 58431 F104 Pro Chassis Kit

Zoom sur le châssis F104 Pro

Tamiya 58431 F104 Pro Chassis Kit

 

Il s'agit d'une version entièrement nouvelle qui apporte un plusieurs améliorations par rapport au F103 :

  • un carter de différentiel qui facilite le changement de roues arrière
  • un empattement plus long
  • des voies plus étroites
  • l'accu est passé en position longitudinale avec un meilleur accès pour les changements
  • des pneus arrière plus larges
  • réglages du carrossage et de la garde au sol avant plus simples
  • nouvelle disposition de l'électronique

 

Le nouveau carter de différentiel

Tamiya F104 gearbox

Les nouveaux triangles avant

Tamiya F104 front drivetrain

Le nouveau positionnement du pack d'accus

Tamiya F104 battery tray

 

En comparaison avec un châssis F103 optionné dans les mêmes proportions que cette version Pro du F104 (c'est à dire avec du carbone et de l'aluminium partout où c'est possible), le petit dernier est environ 7 à 8 % plus léger (on parle de 50 à 60 grammes sur un châssis à vide pesant autour de 730 gr pour le F104 Pro).

Voici une comparaison directe entre un F103 optionné (blanc) et le nouveau châssis F104 Pro (noir) :

 

Comparaison des empattements

Tamiya F103 F104 Chassis Comparison

Les deux châssis vus du dessous

Tamiya F103 F104 Chassis Comparison

Comparaison de la largeur des voies avant

Tamiya F103 F104 Chassis Comparison

 

Les voies arrière et des pneus

Tamiya F103 F104 Chassis Comparison

Crédit photos : Carribou87 de Vintage-RC

 

Les premiers fans ont été unanimes quant au fait que ce châssis était particulièrement bien né, et Tamiya l'a décliné en plusieurs modèles comme à son habitude :

 

58447 Ferrari F60 (2009)

Tamiya 58447 Ferrari F60

58475 McLaren Mercedes MP4-24 (2010)

Tamiya 58475 McLaren Mercedes MP4-24

58559 Ferrari F2012 (2012)

Tamiya 58559 Ferrari F2012

 

A noter également l'existence d'une variante F104W qui a été spécifiquement créée pour accueillir la ré-édition de certaines carrosseries datant du début de l'ère moderne de la plateforme Formula. Ces modèles sont sortis en série limitée avec des carrosseries telles la Lotus Honda 99T, la 102B Judd etc...

En 2012, Tamiya présente la version 2 du F104 : alors que la première mouture utilisait un disque de friction semblable à celui du F103RS pour la suspension du pod arrière, la version 2 introduit un tout nouveau système baptisé "Pillow Ball Link Rear" hérité du châssis RM-01 (que nous verrons plus tard).

 

58534 F104 Pro Version II

Tamiya 58534 F104 Pro Version II

F104 vII Pillow Ball Link Rear

Tamiya F104 vII Pillow Ball Link Rear

42252 TRF101 (2013)

Tamiya 58475 McLaren Mercedes MP4-24

 

L'élimination de la platine supérieure du F104 permet à la fois un gain de poids, mais également l'introduction du nouveau système de suspension qui autorise un nombre de réglages bien plus conséquent sur le train arrière (notamment le tangage et le roulis). Après plus de 10 ans d'absence au plus haut niveau de la compétition en F1, la version TRF (l'équipe de compétition officielle de Tamiya) donne un signe très clair sur l'importance que Tamiya accorde à l'évolution des performances du châssis F104.

 

Conclusion sur les F1 modernes

Si la plateforme Formula n'est pas la plus riche de la gamme Tamiya en ce qui concerne le nombre de modèles, c'est en revanche la plus ancienne puisqu'elle a fait ses débuts dès 1977 avec la Tyrrell P34 Six Wheeler mais également celle dont une génération (le F103) a la plus longue durée de vie. Après pratiquement 40 ans d'évolution, le châssis de la version moderne n'a plus rien en commun avec celui de son illustre aînée. Cette plateforme illustre également toutes les contraintes auxquelles Tamiya et les autres fabricants font face :

  • les aléas du marché : passionné par les buggys dans la seconde moitié des années 80, le public délaisse les F1 (ce qui coïncide également avec le déclin de l'historique catégorie Pan-Car 1/12)
  • bien que Tamiya semble en plein doute (le Road Wizard de 1986 apparaît comme un test du marché), le modèle s'avère tellement novateur qu'il va définir les bases mêmes de la F1 moderne en RC
  • la gestion des licences : qu'il s'agisse de l'inflation sur les droits de reproduction ou plus généralement de techniques de conception qui ne doivent pas être trop similaires à celles des concurrents
  • les erreurs en matière de stratégie commerciale : le châssis F201 a été perçu par le public comme la relève du F103 qui était un grand succès, alors qu'il s'agissait d'un concept entièrement différent

La plateforme Formula marque toute l'histoire de Tamiya sur le marché du modélisme radio-commandé, depuis ses débuts quand les modèles étaient littéralement des maquettes roulantes, en passant par les doutes, les échecs et les succès. Commercialement ou industriellement, ce n'est pas la plateforme stratégiquement la plus importante pour Tamiya, mais c'est assurément l'une des plus riches.

 

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